Robe de bal Second Empire - décorations de corsage
Je réfléchissais dans mon précédent article compilant des sources pour la robe de bal Second Empire à ce qu'on mettait sur un corsage de bal un peu simple :
![]() |
La Mode Illustrée, 1868, comme toutes les gravures de ce post |
Le corsage des robes de bal, pour les robes à crinolines, il a un décolleté large qui découvre le haut des épaules, des manches courtes à très courtes, et des décorations autour du décolleté, qui élargissent visuellement la ligne abaissée des épaules (petit tour de magie pour donner l'impression d'une taille plus fine).
Le plus souvent, on appelle ça une berthe.

Il peut y avoir ou non des décorations sur le reste du corsage. Dentelle, rouleaux, petits volants, ça a l'air d'être le tiercé gagnant des types de déco pour le bal, au moins en 1868.

Des fois la berthe est suffisamment volumineuse (et le corsage
suffisamment court - les corsages de robes à crinoline, c'est très court) pour occuper presque tout l'espace disponible.

Il y a des berthes avec ceinture attachée, voire avec des morceaux qui descendent de la ceinture.

Autre possibilité : les... bretelles. Sauf que c'est bretelles-là ne servent pas à tenir le pantalon, ce sont simplement des bandes décoratives qui parent de la taille et passent par-dessus les épaules. Le plus souvent attachées à une ceinture assortie.

Vous n'imaginez pas ce qu'il m'en a coûté de ne pas faire un jeu de mot "ceinture et bretelles" en titre de cet article.

Dernière option enfin, le truc drapé. Plus précisément, une écharpe ou un fichu de dentelle, qui fait à la fois berthe ou bretelles et truc qui pend de la ceinture. Une seule de ces écharpes de tulle peut être utilisée de plein de façons différentes :
![]() |
Comme la dernière écharpe, on peut aussi trouver des berthes asymétriques |
Un seul grand rectangle de tulle avec une bordure de dentelle noire étroite, quatre options possibles.
Une forme un peu plus évoluée c'est le "fichu Marie-Antoinette", qui a l'air au top de la mode en 1868, vu qu'il est mentionnée trois semaines d'affilée.

Le fichu a une forme un peu plus complexe que la simple écharpe de tulle - même si les matériaux sont similaires. Il forme une berthe avec une pointe qui descend dans le dos, puis il est croisé devant et noué derrière la taille. Les pans sont très longs et viennent habiller aussi l'arrière de la jupe.

Un petit article consacré aux robes de bal. Je n'ai pas les échelles pour les sommes, mais ça permet de se faire une idée de la hiérarchie de qualité et de préciosité entre les matières.
MODES.Les lettres qui me sont adressées prouvent qu’en ce moment toutes les préoccupations ont pour objet les toilettes de bal ; poursuivons donc l'indication de divers genres de ces toilettes.
Robe de jeune fille (chez Mme Fladry). Robe de dessous en taffetas blanc, robe de dessus en tarlatane blanche, avec dix petits volants ruchés, en tarlatane bleue, surmontés d'une ruche double, en même tarlatane, le tout occupant un espace de 35 centimètres environ. Corsage décolleté, bordé d’une ruche et orné d’une berthe croisée, garnie de ruches comme les longues écharpes, qui continuaient la berthe et tombaient jusqu'à la naissance de la garniture. Ces deux écharpes se terminaient en triangle, et étaient encadrées de trois volants ruchés, surmontés d’une ruche double ; deux écharpes semblables tombaient par derrière en guise de pans de ceinture ; celle-ci se fermait sous un chou en ruban bleu. Disons, pour répondre à quelques questions, que l'on trouve aux Magasins du Louvre des robes de tarlatane à dessins variés, de toute nuance, et que ces robes coûtent 9 fr. 25 c. , par dix mètres; on voit qu’en les préparant soi-même, on peut avoir des toilettes de bal très-fraîches pour un prix très-modique. D’autres robes, celles-ci en deux teintes sur fond blanc ou de couleur, coûtent 12 fr. 50 c. ; la tarlatane lamée en or ou argent (rayures, pois ou étoiles) coûte 22 fr. 50 c. ; par dix mètres ; le tulle de soie lamé à petits dessins (je distingue surtout ceux que l’on appelle étincelles) coûte 25 francs par robe. Ces dernières toilettes conviennent surtout aux dames, et, quoiqu’il y ait beaucoup de robes ornées et lamées en argent portées par des jeunes filles, je ne saurais leur conseiller ce genre de toilette.
Chez Mme Bréant-Castel, rue Neuve-des-Petits-Champs, je vois, entre autres, une toilette composée d’une robe de dessous en satin blanc, bordée d’une natte en passementerie de soie blanche, fortement mélangée d’or. Robe de dessus en tulle de soie blanche, beaucoup plus longue que la robe de dessous, et froncée perpendiculairement sur chaque couture réunissant les lés. Cette robe devient ainsi plus courte que celle de satin ; chaque couture des lés est couverte d’une natte pareille à celle de la robe de dessous mais plus mignonne ; chaque natte est terminée par un bouquet de fuchsias en or, dont les clochettes retombent sur la robe de dessous ; même bouquet au corsage, entièrement plissé en draperie ; autour de la taille draperie de tulle blanc, relevée par devant et sur chaque côté du milieu du corsage, par derrière, par des bouquets de mêmes fuchsias.
Il ne faut point songer uniquement aux toilettes jeunes : les mères et les grand'mères seront peut-être bien aises de trouver ici quelques indications relatives à des ornements de toilette commodes et peu coûteux. Je leur dirai donc que la mode autorise les robes, les fichus, les ceintures longues en dentelle lama, et que le bon goût ne les rejette pas. Il y a, si je ne me trompe, une différence notable a établir entre la dentelle dite imitation et la dentelle lama : celle-ci est préférable à tous égards, car elle n'entreprend pas de tromper sur sa qualité et son origine. La dentelle imitation en soie devient très rapidement molle, et retombe en plis flasques et piteux ; de plus, son prix, quoique moins élevé que celui de la dentelle de Chantilly, l'est infiniment trop pour de la dentelle imitée et pour des objets de fantaisie auxquels la mode n'accorde pas une existence très-longue. Toutes ces raisons militent en faveur de la dentelle lama : ses dessins sont extrêmement riches, et elle se maintient toujours ferme, quoique souple ; on en fait (en noir ou bien en blanc), des fichus Marie-Antoinette à longs pans carrés ou arrondis, qui se portent sur un corsage décolleté, et tout aussi bien sur les corsages surmontés d'une robe de teinte claire. Le prix varie de 45 à 85 francs : des corselets formant bretelles et ceintures coûtent de 20 à 35 francs ; des ceintures longues (noires), de 7 fr. 75 c. à 18 fr. 50 c. ; les mêmes (blanches), de 10 fr. 50 c. à 12 fr. 75 c. ; les fichus Marie-Antoinette avec fond en tulle brodé, entre-deux et garniture en dentelle de Chantilly, coûtent 65 francs et davantage, selon la hauteur et la finesse de la dentelle. J'ai pris l'indication de ces prix aux Magasins du Louvre. La dentelle blanche dite yak est particulièrement belle et élégante pour les toilettes du soir ; ainsi une robe de satin ou même de taffetas, de belle teinte mauve ou verte, faite très-longue sans aucune garniture, à corsage montant et plat, portée avec un fichu Marie-Antoinette, à très-longs pans croisés par derrière, en dentelle dite yak, compose une belle et simple toilette de mère ou de grand'mère, portée sur un corsage décolleté. Ces fichus conviennent tout autant aux jeunes femmes. Je ne dois pas oublier d'ajouter que les personnes possédant un bournous, soit en dentelle yak, soit en dentelle de laine noire, l'utilisent en guise de robe de dentelle, en le disposant suivant les indications de la gravure de mode du n° 4.
Comme les autre décorations de corsage, ce fichu peut être changé, modifié, passé d'une robe à une autre. Dans une société où la couture fait partie de l'éducation de base des femmes, et où les vêtements
coûtent cher, on va plutôt jouer sur les décos pour renouveler sa garde-robe.

Toutes les gravures de cet article sont des scans de ma collection personnelle de magazines anciens. vous pouvez soutenir leur acquisition et mon travail de numérisation avec un don sur mon KoFi. Vous pouvez retrouver toutes les images que j'ai déjà numérisées sur mon FlickR, elles sont en Creative Commons donc vous pouvez les télécharger en haute résolution.
J'ai une newsletter pour suivre mes évènements importants et être tenu-e-s au courant de mes ventes de céramiques et illustrations, c'est par ici :