Retour d'exposition - Des Cheveux et des Poils au MAD Paris

Les deux dernières expos au MAD Paris m'avaient un peu épargné le cycle éternel de "ceci est un sujet super intéressant sur l"histoire de la mode" à "cette expo m'a mise en rogne". Forcément ça pouvait pas durer hein ?
Détail d'un portrait d'Elizabeth 1 d'Angleterre montrant sa coiffure ornée de nombreux bijoux
Les cheveux et les poils, sur le papier, ça me semble un sujet hyper intéressant - peut-être même trop large pour une seule exposition.
Ce qui n'a pas empêché le MAD d'avoir dans la seconde partie de l'exposition une salle quasiment... vide. Occupée principalement par de faux sièges de coiffeurs, avec des miroirs sur lesquels sont dessinées des coiffures historiques... pas à la bonne place ni à la bonne échelle pour que l'on puisse se "voir" avec. Intérêt de la chose ? Portée pédagogique ?
Spoiler : on ne ressortira pas de là en ayant appris grand chose. Selon la formule pas grand chose = rien, voire quelques trucs faux. Je suis sortie en voulant tout refaire (parce qu'on ne brûle pas des pièces de musée, juste leur présentation) et en ne voyant que ce qu'il manquait...
Photographie fin 19ème d'une femme à la coiffure complexe avec postiches tressés
Elle c'est Marie Taglioni, juste la meuf a qui la danse classique doit les pointes. Mais ça on ne vous le dira pas dans l'expo. On est jsute là pour dire "oh de jolis cheveux"

Il faut dire que la pilosité dont on parle, en fait, c'est uniquement celle des riches occidentaux à partir du 16ème ou 17ème (officiellement 15ème mais honnêtement c'est pauvre). Il y a un petit peu d'Antiquité qui traîne dans un coin, Égypte et Rome, perdue quelque part sur un côté au milieu de l'exposition.
Buste d'enfant fin 18ème
Je les ai pas en photo parce que la lumière était... graoumf. Donc à la place cette tête d'enfant fin 18ème qui était magnifique.

Ça correspond à l’impression générale : c'est rangé n'importe comment. Le parcours est labyrinthique et n'aide pas du tout à la compréhension - on ne sait pas où on va au propre comme au figuré.
On commence par un truc plus ou moins chronologique (très lacunaire) sur les coiffures, ensuite on part dans les perruques, les outils de barbier, la pornographie, les militaires... J'ai eu l’impression que c'était mis en tas, vaguement par thème, sans analyse.
Perruque moderne haute couture
Pour animer et capter l'attention, le tout est saupoudré de vidéos. Plein de vidéos. On entend du son à peu près en permanence, et c'est Fatiguant. Le générique de Magnum pendant qu'on essaye de lire des choses sur l'épilation, c'est rude - sans parler de l'impression que le tout est sponsorisé par Gillette avec l'enchaînement de pubs. Là encore, aucune analyse, juste une empilement de contenu.
J'avais déjà râlé sur le cauchemar sensoriel qu'était l'expo Mugler, cette fois-ci encore, l'accessibilité c'est pas ça du tout. Du son partout donc, pas de bancs pour s'asseoir (c'est pourtant pas la place qui manque), des légendes dans une police de caractère illisible comme j'en ai rarement vu (une performance, vraiment !)
Une série de tête avec perruques 1920
Côté contenu, beaucoup de perruques - de belles choses modernes, des choses anciennes présentées à 3 mètres de haut... et une totale mécompréhension de l'usage de la poudre et de la pommade au 18ème siècle. C'est quand même dommage de se planter comme ça sur le thème central de l'expo ! (pour de l'info de qualité, il y a le bouquin de American Duchess et celui de Kendra Van Cleave sur le sujet, entre autres)
Un postiche de boucles blondes pour entourer le visage posé sur une tête de mannequin blanche
Y a d'autres plantages magnifiques ( saluons la performance là encore), comme ressortir cette légende qu'on croise partout (sans qu'elle soit jamais scientifiquement attestée) sur l'origine de la fontange, ou cette publicité milieu 19ème pour un "salon dépilatoire", où il n'est en fait pas question d'épiler... mais d'enlever les cheveux blancs - elle est mal interprétée et donc mal rangée, au milieu des jambes et poils pubiens.
Détail d'un bracelet en cheveux, composé de minuscules tresses entrelacées et d'une boucle avec ds cheveux d eplusieurs couleurs tressés en damier
Non mais la finesse de toutes ces petites tresses !!!

Il y a de très beaux objets - des bijoux en cheveux, des bustes en marbre d'une finesse incroyable, des perruques des films Sissi... mais on ne profite pas bien de tout cela : les instruments d'entretien de la barbe, par exemple sont tous posés serrés dans une toute petite vitrine sans explication de l'usage de chacun, sans analyse (see a pattern ?).
Idem, la vitrine de produits capillaires... est-ce que cette accumulation apporte quelque chose ? (spoiler : je crois qu'on est toustes au courant que le rayon shampooing de nos supermarchés est grand) Les informations sur le soin du cheveu à domicile sont d'ailleurs très limitées, voire inexistantes avant la période moderne. C'est ballot, si la question avait été posée on aurait pu parler de poudre et surtout de pommade de façon censée pour le 18ème.
Buste de femme en marbre fin 18ème finement sculpté
Mais ce qui manque le plus, c'est tout ce qui va sur le cheveu pour le cacher. Chapeau, foulard, voile... bah non. Y a pas. Enfin y a un texte biblique, et... hop c'est tout. C'est même pas une blague, il n'y a Pas. De. Chapeaux.
Le cheveux racisé n'est pas mentionné non plus, à part dans un contexte actuel dans la dernière salle. Hop, ça n’existe pas !
Bref : grosse, GROSSE déception. Il m'arrive d'être déçue et de quand même recommander la visite avec un caveat, mais là... non, c'est juste nul.

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